On jouait déjà avant ta naissance, donc on a raison

Genre: Point & click • Editeur: Lucasfilms Games • Date de sortie: 1993

Day of the Tentacle

Par • le 16/12/2009 • PC, Tests & previews • Exemplaire du jeu payé avec nos sous •

En des temps immémoriaux, disons 1982, George Lucas se dit que peut-être, ce serait pas mal de s’intéresser un peu à un marché plein d’avenir, le jeu vidéo. Bon, George ne pouvait pas deviner que ça allait se casser la gueule un an après, et en un sens tant mieux, parce que sinon il n’aurait jamais monté Lucasfilm Games et ceux-ci n’auraient jamais accouché d’un chef-d’oeuvre nommé Maniac Mansion. Vu le succès de ce dernier, la société, renommée entre temps LucasArts, met une suite en chantier et celle-ci débarque en 1993, en VGA s’il-vous-plaît.

What’s a tentacle ?

Psychedelique !

Le Docteur Fred Edison est un type génial, mais pas un chic type. Après avoir inventé des tentacules anthropomorphes dénués de bras, après avoir kidnappé une jeune fille nommée Sandy et manqué détruire la planète à cause d’une météorite ayant rendu sa famille folle, celui-ci passe sa vie dans son laboratoire secret à imaginer de nouvelles inventions. L’une d’entre elles, le Sludge-o-matic, ne semble d’ailleurs avoir pour fonction que de polluer le cours d’eau avoisinant et où se promènent ses tentacules apprivoisées. Le tentacule violet, d’un naturel hargneux, en boit quelques gouttes et se retrouve affublé de membres préhensiles: subitement rien ne lui paraît impossible, et il se lance à la conquète du Monde au grand désespoir de son acolyte, le tentacule vert. Un scénario portnawakesque au possible, qui se devait d’avoir un héros au diapason. Ce héros est un geek. Ce héros, c’est Bernard Bernoulli.

Le roi de la vanne

À l’époque le geek n’est pas ce jeune homme fringant en costard écumant les soirées arrosées organisées par des fabricants de PDA ou de téléphones portables, non: c’est un type socialement inepte portant de grosses lunettes à double foyer, aux choix vestimentaires douteux, capable de réciter par coeur les différences entre BSD et SysV, pouvant instantanément retrouver de mémoire dans quel numéro de Spider-Man celui-ci combat le Doc Octopus pour la première fois, mais incapable de donner le titre d’une chanson de Britney Spears. D’ailleurs il ne sait même pas qui c’est, Britney Spears. Malgré ce lourd statut Bernard est néammoins proche de deux autres specimens vaguement humanoïdes: Hoagie, roadie d’un groupe de rock universitaire, et Laverne, étudiante en biologie se baladant munie d’un scalpel (une dissection inopinée est si vite arrivée).

Look Hoagie, a hamster !

George a perdu ses dents

Prévenu qu’une sombre affaire se trame chez les Edison, Bernard, qui faisait déjà partie de l’équipe de sauvetage de la jolie Sandy, sait que l’heure est grave. Ni une ni deux, il retourne au manoir accompagné de ses deux colocataires. Prévenu du danger, le Dr Fred décide d’envoyer la fine équipe dans le passé afin d’empêcher les événements de se produire. Mais le faux diamant utilisé par sa machine temporelle se brise: Bernard reste dans le présent, Laverne est envoyée dans un futur où l’homme est asservi par le tentacule, et Hoagie se retrouve à l’époque des pères fondateurs, entouré de ces derniers. L’objectif est donc de ramener ces deux voyageurs temporels à notre époque et réduire à néant les rêves de grandeur du sinistre tentacule violet.

Oh ! Harold !

Il sera donc nécessaire de jongler entre les différents personnages (en cliquant sur leurs portraits) afin de les faire interagir avec leur environnement. Pour ce faire le HUD propose différentes actions (Aller, Prendre, Parler, Utiliser…) et lors des discussions des choix multiples s’offrent au joueur. Bien entendu, chaque nouvelle pièce ou nouveau décor visité devra être consciencieusement inspecté afin d’y récupérer indices et objets indispensables à la continuation de l’enquète. Magie des voyages temporels, il est également possible pour les différents personnages de s’envoyer des objets (tout simplement en faisant glisser l’objet sur le portrait du personnage-clible) et, paradoxe temporel oblige, le futur de Laverne sera régulièrement altéré par les actions entreprises par Bernard et Hoagie. Il faudra donc souvent faire preuve de logique pour deviner qu’un objet récupéré en 1770 n’aura plus la même forme 300 ans plus tard ni forcément la même utilisation. Étant donné qu’il est impossible de mourir ou de perdre dans Day of the Tentacle (contrairement à son prédécesseur) l’accent est mis sur des énigmes pas forcément évidentes de prime abord mais jamais incongrues.

Float over here so I can punch you

Techniquement il est difficile de prendre le jeu en défaut, surtout en gardant à l’esprit que celui-ci est sorti il y a maintenant plus de quinze ans. La 2D est jolie et colorée, les personnages ont des mimiques dignes de dessins animés, et sur la version CD-ROM du jeu (une version disquette, antérieure, existe également) les dialogues sont tous intégralement doublés par des acteurs talentueux. Le scénario, très bien écrit et drôle, est mis en valeur par des dialogues hilarants et tous plus délirants les uns que les autres. Mais surtout, c’est bel et bien grace à l’intelligence de son design que Day of the Tentacle demeure encore, à l’heure actuelle, l’une des références du Point & click. Incroyablement actuel dans son déroulement, jamais aucun autre titre n’a aussi bien exploité la thématique des voyages temporels et de l’influence des événements passés sur le futur à venir. Bien évidemment, une fois connu sur le bout des ongles, le jeu est finissable en quelques heures (deux, tout au plus), mais c’est bien une autre paire de manches lors de la première découverte: une expérience indispensable.

Difficile de prendre en défaut Day of the Tentacle. Drôle, coloré, inventif, délirant, intelligent, le titre se joue des époques et donne encore, plus de quinze ans après sa sortie, des leçons de game design. Une expérience toujours aussi agréable, et salutaire.

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est joueur depuis 1985. Multiplateformes, multigenres, souvent exigeant, parfois tatillon, mais jamais blasé.
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10 commentaires »

  1. Best point & click. Ever.

  2. Toujours entendu parler, jamais joué… Shame on me
    Allez hop, sur ma to-play list, right now!

  3. Tu as oublié de préciser que la machine temporelle est constitué de trois chiottes dans lesquels chaque personnages sera envoyé respectivement dans son époque. Les transferts d’objets se faisant bien sûr en jetant l’objet dans le chiotte pour qu’il apparaisse dans celui du personnage visé.

    Magie de la technologie, les personnages peuvent également parler par chiottes interposées.

    Et je ne dirais qu’une chose : Ha. Ha. Ha.

  4. @Hypolite: parce que je ne voulais pas trop en dire, pour ne pas gâcher la surprise.

    Bravo hein !

  5. En même temps, c’est le premier truc que tu apprends dans le jeu, donc ce n’est pas vraiment du spoil, plutôt une mise en bouche de tout le reste.

  6. Il faut aussi mentionner le générique d’introduction qui est tout simplement splendide ! (tout comme les différents tableaux de jeu, tres fournis en détails)
    L’humour est débile à souhait, les gags s’enchainent et s’imbriquent notamment grace aux interactions temporelles, du coup ça rend les actions un brin plus cohérentes que dans d’autres titres de l’époque (comme Monkey Island).
    Et pour ceux qui n’auraient pas joué au premier, allez donc utiliser le vieil ordinateur qui traine dans la pièce ou Ed collectionne ses timbres ;)

  7. Yep, tout plein d’accord avec ce test. Et pour jouer au mieux dans le contexte de l’époque, il faut débrancher sa trucbox adsl, et fumer de la tête pendant des plombes pour se sortir des énigmes. Ou téléphoner à un pote éventuellement plus chanceux pour être débloqué. Ou attendre le tilt du mois prochain et sa soluce.
    Je n’ai perso plus la patience pour les point & click, alors je salue la performance des courageux qui s’y plongent à l’ancienne.

  8. Le truc le plus ardu que j’aie fait jusque-là était Gabriel Knight 2, et encore, au bout de quelques heures je me suis aidé de la soluce de Joystick à tout bout de champ (au passage, oubliez Tilt, c’est Jeux… Crack avec Danbiss et Danboss qu’il vous faut). Trop la honte…

  9. Et pour ceux qui n’auraient pas joué au premier, allez donc utiliser le vieil ordinateur qui traine dans la pièce ou Ed collectionne ses timbres ;)

    Mieux vaut sauvegarder sa partie avant, car on ne peut pas revenir à Day of the Tentacle une fois qu’on est dans Maniac Mansion autrement qu’en fermant le jeu avec Alt-F4 et en le relançant…

  10. Et si on utilise ScummVM, ça ne fonctionne pas comme ça, il faut ajouter Maniac Mansion comme si c’était un jeu à part.

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