Genre: MMORPG • Editeur: Turbine, Inc - Codemasters • Date de sortie: 24 avril 2007
The Lord of the Rings Online: Shadows of Angmar
Par PatrikRoy • le 15/5/2008 • À la une, PC, Tests & previews • Exemplaire du jeu payé avec nos sous •Disclaimer
Je met en garde le lecteur contre mon fanascisme de la V.O. Seront donc bannis de ce test les « Saquet-de-Besace » ou autres « Poney Fringuant ». Je rappelle aussi qu’un minimum de connaissance Tolkienarde vous évitera le ras-le-bol au milieu de ma déjà pénible prose. Merci de votre attention.
Commençons ce test les bottes trempées dans un sol plutôt meuble, voire spongieux, genre la tourbière fétide d’un quelconque marais mélancolique. Après s’être assuré de l’absence de toute tortue démesurée, je sors de mon sac sport billy deux tower shield au chef réhaussé (le motif importe peu) que je plante illico dans le cloaque fumant de ce charmant endroit. Mes boucliers foutage-de-gueule-proof bien arrimés, je peux poser mon beat sur le flot sans remous de vos insensibles sarcasmes : voici le premier test de MMORPG dans ce monde anti-abonnement.
fig. 1 – Panorama sur Hobbiton, Shire – Fin du troisième âge. De gauche à droite : The Hill, Bag End, Hobbiton-Bywater, Tuckborough (vraiment au loin) et des champs de pipe-weed. Rastafarai !
Patrik, tu lourdes avec tes jeux qui datent (Général Kwyxz)
Je sais, d’où l’utilité de mon premier bouclier. Ma défense s’appuiera sur le fait que pour tester un jeu de cette envergure, le journalisme total m’a imposé énormément de travail de fond ; ce style de jeu n’a pas de fin à proprement parler. Saurons de quoi je parle ceux qui on pu s’extirper de World of Warcraft – on prendra le monstre devenu référence, ne soyons pas snob à coups d’Ultima Online ou autre vieux truc d’élitiste précurseur. Oublions les autres qui ne me liront pas puisqu’ils seront en plein battleground.
Je veux dire par là qu’à se taper des millers de quêtes solo secondaires, des centaines de quêtes en communauté (le « groupe » de LOTRO), des paquets de nains dégommés en PVP, la quête principale mise à jour au fil des mois sous forme de « book » (chapitres du scénario décomposés en plusieurs quêtes), des heures de glande dans les champs d’herbe à pipe, du farming automate pour se faire du faux fric, des deals aux enchères, des blabla au coin d’un feu de bois du Prancing Pony, le joueur voit passer des mois, des années sans se rendre compte de l’étendue des dégâts.
Mais avant de faire le procès de ce genre de pratique ludique à l’ampleur grandissante, aux mots-clé dangereux comme « pompe à fric » ou « addiction linéaire », je vais tenter de gribouiller les grandes lignes des caractéristiques de ce piège à gamer avec du Tolkien dedans.
Patrikeu, je t’emprunte tes idents pour tester Liv Tyler sous tous les angles (Docteur Trem_r)
Je ne pensais pas lâcher ma deuxième protection tout de suite, mais ok.
Cher Poto, tu peux oublier tout de suite les lèvres charnues de son père. N’imagine même pas caresser les cheveux de Cate Blanchett. Enfonce-toi bien loin le souvenir d’un Sam Gamegie derrière tes… enfin t’as compris. Tu n’es pas un dixième membre de la Communauté de l’Anneau. Tu n’es pas là pour trainer tes braies entre les pattes de leurs poneys. C’est là que je salue un premier pic d’intelligence de Turbine. Une grosse license comme celle-ci aurait pu se contenter de tourner à 1 km autour de la bande de trajet Bag-end – Piton de la Fournaise, fournir une réplique des décors du film, les quêtes correspondant aux happening du voyage et point. Le blé serait rentré suffisamment pour amortir l’investissement de dev, et puis hop abandon. Ce n’est pas le cas, et je vais y revenir plus loin. Restons pour l’instant sur le rôle que ce « RPG » vous propose.
Comme dit Gandalf à la fin de The Hobbit, les héros et leurs exploits n’existent que grâce à la meute de chair à canon qui leurs déblaient le terrain (ok, il dit pas exactement ça, mais je vous fais un résumé rapide clac en gros). Que votre perso soit Humain, Elfe, Nain ou Hobbit, il va falloir ravaler votre fierté de « chosen one » au destin majestueux sauveur de monde à la Forgotten Realms ou Elder Scrolls. Pour le gros nioub comme vous, peinard dans son village, on va vous montrer que la Menace se réveille partout et touche le moindre péon.
You’ve got to rule them all, come on ruuule them’
Hop, on déguise en 5 minutes son avatar avec des morceaux de corps censés le différencier des milliers autres, on met trois plombes à lui trouver un nom correct, et votre aventure commence. Enfin pas vraiment, car on passe par une désormais classique zone de départ-apprentissage à l’abri du monde véritable, mais quand même dérangée par des méchants pas cool. L’oppression du Mordor se fait sentir à chaque tas de foin et vos 5-6 premiers niveaux (le jeu de base en comporte 50) se solderont par une instance. C’est l’exam’ où vous serez seul dans votre première quête épique, le prologue des 13 books (à l’heure du test), l’histoire de fond du jeu où votre principal boulot sera de faire diversion face à l’Ennemi, lui foutre des grosses mandales et le perturber afin que Baggins et ses potes progressent au mieux.
C’est ce que je vous disais au début : faire tout pour permettre aux beaux gosses de récolter la gloire, alors que dans l’ombre vous cravachez comme des buses, vous vous plantez (cf. l’épisode mal géré de l’opinel dans l’épaule du Porteur), vous dégommez du super-evil, bref, le métier. Donc pendant que la communauté incomplète part vers l’est, vous allez vous concentrer sur le nord à l’assaut du royaume d’origine des neufs Nazgûls et de leurs sombres chevaux : Angmar. La vache c’est bien foutu, c’est dans le titre du jeu.
LOTRO s’étend pour l’instant sur la moitié nord de l’Eriador, avec un gros trou (budgétaire ?) entre Grey Havens et The Shire. La douzaine de zones proposée s’étend d’ouest en est depuis l’Ered Luin jusqu’aux contreforts des Misty Mountains, et du sud de l’Old Forest à l’Icebay du nord de Forochel. Les pélerins peuvent même se taper l’exact trajet des gamins jusqu’à Rivendell. Brisons tout de suite les espoirs de roleplay : ce chemin doit à pieds se faire en une ou deux heures à peu près. Ceci dit je ne connais pas encore de monde vituel si énorme qu’il faille camper sur la route pour pouvoir le traverser de bout en bout. Pour trancher, je jugerai l’immersion « très correcte », car ça reste long, très vaste, et selon un respect aussi scrupuleux que possible des lieux et personnages issus des romans.
Sans être archi-fan de la trilogie LOTR, j’avoue quand même avoir depuis le lycée rêvé de fouler Middle-Earth. C’est sans doute sur cette corde sensible du public héroïc-fantasy que se joue 80% de l’intérêt des joueurs présents sur l’un des 11 serveurs du jeu (5 anglais, 4 allemand et 2 français). Ouais, on est loin des plus de 200 serveurs de WoW. D’ailleurs comment se distinguer du géant, lorsqu’on propose le quasi-même gameplay de questing, farming, crafting, leveling, etcing… ? Trois ans les séparent, c’est bien plus qu’il n’en faut pour analyser les ficelles de la poule aux oeufs d’or. Comment faire changer de support les joueurs bien installés ou en attirer de nouveaux ? Développeurs d’Age of Conan et de Warhammer Online (qui me lisez, j’en suis sûr), voilà ce que LOTRO a choisi d’offrir en sus.
A red sun rises, blood has been spilled this night… mpffrrr
D’abord, le progrès doit être visuel. Ici le champ de vision est démesuré, et les détails plutôt fournis pour un jeu destiné à du low-poly. Les options graphiques vraiment complètes s’ajustent sur 2 sets de textures (low ou hi-level), 5-6 niveaux de détails pour la trentaine d’éléments réglables comme la distance de vue, les ombres, reflets, feuillages… un peu comme ce qu’offrait Oblivion en 3 fois plus poussé. Chaque machine peut donc trouver son compte de tweak pour DirectX 9 ou 10. Comptez quand même un matos graphique assez onéreux pour pousser tout à donf.
Pour rester dans l’artistique et pencher dans le subjectif, je suis complètement fan de l’ambiance sonore et musicale. Il est marrant de constater que le compositeur a conservé quelques thèmes « généraux » aux tonalités proches de ceux d’Howard Shore mais que les musiques annexes qui accompagnent la majeure partie de vos balades sont faites maison. Un boulot créatif de dingue avec orchestre médiéval et peau de chèvres, une moyenne de 20 à 30 musiques par zone au jugé, et je crois avoir lu qu’il a fallu près de 7 ans à pondre le tout. Et parce que je n’ai pas le droit de monopoliser un paragraphe pour ça sans contrepartie, je me dois de foutre en écoute quelques ziques : une petite bière dans une auberge de Bree, farniente sur les bords de Brandywine River, et moissons dans les champs de Green Hill Country.
Plus concrètement, la distinction du gameplay passe par l’arborescence du développement de votre personnage. Si les skills s’apprennent toujours chez votre maître de classe, on s’écarte du nombre de points de compétence obtenus à chaque niveau auquel nous ont habitués pas mal de RPG. Chaque zone possède un certain nombre de « deeds » (ou « tâches » mais j’aime moins) dans des catégories comme l’exploration, l’histoire, la réputation… ici trouvez toutes les ruines des Dúnedain, là remplissez tant de quêtes, ou encore devenez un spécialiste de l’assassinat de mouches en série. A chaque deed remplie, vous obtenez un bonus qui va du simple titre à afficher au-dessus de votre perso « Gnafron le champion du manger de tartes », jusqu’à l’upgrade d’une des 20 virtues disponibles : Loyauté, Patience, Discipline, etc. Autant de caractéristiques permettant de booster vos compétences. Bien sûr, seul un nombre limité peuvent être appliquées à votre personnage, en fonction de votre niveau et certaines suivant votre classe : chasseur, voleur, mage… 7 en tout déguisés en « lore-master », « champion » ou autres (le nom importe peu), ce sont toujours les mêmes depuis D&D.
Ça paraît p’t’être le bordel à expliquer, mais c’est l’assurance de nombreuses combinaisons possibles dans l’évolution de votre personnage. Et puis vu la pénibilité de certains deeds, c’est directement proportionnel à votre investissement dans le jeu. On retombe parfois dans la fidélisation du client par la répétition basique d’actions bidon, mais hey, c’est le business du MMO ça : occuper le joueur par n’importe quel moyen, pourvu qu’il ne lance pas steam ou aille terminer son devoir / thèse / boulot.
Le summum de la différenciation par l’absurde reste le « housing ». Ouais vous l’aurez compris, on peut avoir une baraque dans un des 4 lotissements prévus à cet effet (qui sont en fait des instances), moyennant le paiement d’un loyer. Arrêtez de rire. 3 tailles d’habitations sont présentes, depuis celle pour le prolo jusqu’au mini-château des « kinship » (les guildes). Chaque pièce et jardin peut se décorer avec des objets disponibles chez les vendeurs, mais aussi par des drops rares comme des poissons ou des têtes de phacochères à accrocher aux murs préparées chez le taxidermiste… et je m’arrête là, je voudrais pas ridiculiser les élans d’originalité des développeurs.
D’ailleurs quand j’y pense, le housing est apparu en patch au book 11, tout comme la pêche au book 13, à la suite des demandes répétées lors des Dev Chats organisés tous les mois. Un souci de qualité très apprécié des joueurs qui peuvent voir le jeu s’enrichir au gré de la pertinence de leurs propositions et suivre l’actualité « à taille humaine » du développement. Voilà, c’est ce genre de trucs qui créent le cachet « vivant » de LOTRO. Ça et les instruments de musique, qui peuvent être joués note par note sur 4 octaves et donnent lieux à la formation de groupes dans les bars. Ça et les mini-scénarios scriptés que l’on dirait sorti d’un Ultima VII lors des quêtes épiques, d’où le sentiment de participer à une histoire et pas à un enchainement de quêtes robotisées.
Ask yourself a question: do you really want to make me angry?
Le choix scénaristique de Turbine était clair dès les premiers E3 : tous ensemble contre Mordor. Seuls les « Free People » (aka « Freeps ») devaient être joués, et il n’était pas question dans le jeu d’incarner n’importe quoi d’über-puissant qui mettrait en danger l’immersion opprimée du joueur (comme un haut-elfe ou un rôdeur). Comme ça promettait d’être triste au bout d’un moment, la FAQ officielle confirme que le système « Monster Play » est la réponse à la question du PVP.
Cette option est disponible en plus de vos personnages principaux, et vous permet de jouer les 6 classes créées côté Sauron. Sans rentrer dans le détail, une seule zone est réservée à l’affrontement Freeps / Creeps (pas de boucherie possible chez Elrond, désolé) et votre bêbête commence au niveau 50, donc tout suite prête à se bouffer du nain. Votre objectif sera donc d’égorger du hobbit par centaines, si possible en groupes de 24 « maggots » unis dans l’arrache : les raids. Chaque joueur occupe une position dans le ladder invisible du PVP, et plus la proie bousillée est forte, plus vous récoltez d’Infamy qui fait grimper le rang de votre bestiole. Comme la carte est divisée en 5 forteresses à capturer puis à défendre, tout ce beau monde s’étripe non-stop pour la suprématie des Ettenmoors. Entre 50 et 60 quêtes permanentes sont là pour vous filer des points de destinée qui se convertissent en compétences spéciales associées à votre race.
Je dois être bon public car mon araignée me plait bien. Les quêtes sont franchement répétitives, mais c’est malgré tout plaisant de démouler les armées d’en face, de coincer un type dans les hautes herbes ou de se faire surprendre par « fufu » le Burglar qui vous en met plein la face. J’oubliais qu’il existe une classe spéciale jouable une heure contre vos précieux points de destinée : le troll. On ne peut en avoir que 2 simultanément dans la zone, mais quand ils bossent côte à côté, c’est poilant de voir fuir les masses à leur arrivée. Les freeps ont bien sûr leur équivalent, le rôdeur, bien moins impressionnant visuellement mais tout autant à éviter en corps-à-corps. Bon, ben je crois que j’ai terminé. Des questions ?
On peut y aller maintenant ?
Oui oui, je termine ce test trop long par un mot sur l’abonnement. La base est à 13€ par mois pour un jeu lui-même à moins de 20€. Je conçois que le système de paiement pour jouer est toujours un obstacle mental. Le dernier réfractaire que je connaissais est maintenant maître de guilde, et la dernière m’a piqué mon compte pour aujourd’hui avoir un perso plus élevé que le mien. L’éditeur innove de ce côté en proposant la Lifetime Subscription. You heard me, LIFETIME SUBSCRIPTION. Moyennant l’équivalent de trois Call of Duty 4, vous passez en illimité 24h/24 7j/7, même sur les communications internationales. Une offre qui rapporte pour ceux qui se sont saignés dès le début, et qui n’auront à payer que la boite de la première extension officielle Mines of Moria prévue pour le troisième trimestre 2008.
En ce moment LOTRO est à l’essai pendant 14 jours (enlevez-en un pour télécharger le monstre), alors moi je dis simplement : allez vous faire une idée vous-même, maggots.
Oh joie, The Lord of the Rings Online : Shadows of Angmar a su exploiter correctement sa license. Sans réinventer le genre, les améliorations du gameplay "à la WoW" sont suffisantes pour maintenir son identité propre. Cerise sur le pain de nain, vous aurez le plaisir de vous balader quasi-librement dans la meilleure simulation d'Eriador qui soit. Fidélité des lieux, quête principale bien ficelée, perte de temps assurée à travers les pièges classiques des MMO. Le PVP est cantonné bien à part et ne risque pas de pourrir l'intégralité du contenu solo. Le mot "RPG" est toujours une bonne blague, mais on s'en rapproche, c'est bien.
PatrikRoy est vidéojoueur depuis ses Game & Watch de 1982. Il préfère le clavier + souris à tout type d'ustensile ludique, et pourtant il s'en est enfilé une sacrée variété. Il commence toujours par le couloir de gauche dans les donjons ou stations spatiales inexplorés. Il n'aime pas les jeux de sport, ou alors si on tire sur le ballon. Il n'aime pas les jeux de baston, ou alors si on tire sur les spectateurs. Il n'est pas cruel, juste violent.
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C’est un excellent MMORG, je vous le conseille vous ne le regretterez pas!