On jouait déjà avant ta naissance, donc on a raison

Fusillade de Winnenden : Pour prolonger la discussion

Par • le 15/3/2009 • Entre nous

Suite à mon article sur « l’amoklauf » qui vient d’avoir lieu à Winnenden en Allemagne, j’ai contacté par e-mail mon ami l’écrivain Christian Combaz, que j’avais cité à plusieurs reprises sur ce blog, afin de lui faire part de mes opinions. En effet, il s’était déjà exprimé sur la question de la violence dans les jeux vidéo, et c’est d’ailleurs notre correspondance qui m’a incité à faire tout ce travail de recherche et d’écriture sur la question. J’étais donc plus qu’intéressé par ce qu’il en pensait. Il en a résulté un échange entre nous que je reproduis ici avec son accord, car cela me permet de clarifier les positions de mon précédent article.

Voici donc sa réponse :

« Cher S. Fenton , pour une fois je vous lis plus longuement et je vous écris en parallèle à ma lecture (celle de l’article que vous m’avez conseillé).

Parmi les questions que vous vous posez, il y a toujours le pourquoi, pourquoi Counter Strike et pas  Postal ou GTA, etc. Pourquoi de petites villes sans histoire. Pourquoi, pourrait-on ajouter, les villes à rythme de croisière protestant et non les villes du sud prétendument bouillantes comme Naples ou Madrid.

A la première question je réponds et j’ai déjà répondu par un mot anglais, cornered. Le héros de Counter Strike ou Doom,  contrairement à celui de GTA, est souvent cornered, coincé dans un couloir, sans autre possibilité de s’échapper que de tuer l’obstacle. C’est exactement ce qui rend les animaux féroces. Ensuite on peut dire la même chose de l’état d’esprit protestant nordique allemand : le côté « patience chrétienne dans l’écoute » excède les adolescents qui aimeraient bien au contraire manifester leur impatience par la course, la violence d’une vie sociale pleine de défis, dans un univers comme la société italienne ou française . Dans les sociétés méridionales l’image, la tchatche, la ruse, le mensonge, la violence, jouent le rôle de défouloir permanent. On observe bien entendu des phénomènes de violence en bande dans les milieux défavorisés latins, mais la violence solitaire et qui rumine la tentation de la table rase est un phénomène de pays sans exutoire , où tous les hommes ont été domestiqués par le politiquement correct.

En un sens  aussi, on peut dire que la violence de type rampage exprime une nostalgie de la vertu, elle rappelle l’ange exterminateur, celui qui punit tout le monde parce que la fourmilière humaine est malade. Vous observez cette tentation de l’extermination préventive chez tous les grands angoissés, Céline qui voyait grouiller vers lui les chinois et les juifs, et Léonard de Vinci qui noyait des armées turques en inventant d’incroyables procédés pour leur échapper.

Au passage je serais moins indulgent que vous sur les jeux vidéo, certes ils ne sont pas déterminants dans le passage à l’acte, mais ils offrent une sorte de bec verseur à l’imagination pour l’irruption dans le réel. Par exemple le geste de recharger, le changement d’arme, la façon de se déplacer dans un couloir et entre les obstacles,tout cela s’apprend et se retient au fil des années. »

Et voici ce qu’à mon tour je lui ai répondu. Cette réponse fera également office de post-scriptum à mon précédent article.

« Cher ami,

Tout d’abord, merci d’avoir pris le temps de me lire et de me répondre. Cela dit, je me permets de vous demander encore une fois votre attention, car certains points méritent d’être clarifiés.

Ayant lu Enfants sans foi ni loi, je me souviens bien du mot « cornered ». Je l’utiliserais volontiers pour décrire l’état mental dans lequel se trouvent certains joueurs face au lynchage que subit parfois leur loisir. Pourquoi se sentent-ils cornered et quelles sont les conséquences ? J’avais commencé à développer ces deux points à propos de Rainer Fromm dans mon article sur la conférence de Munich, mais chacun d’entre eux mérite en fait un article à part entière, et j’y travaille. Revenons plutôt aux jeux où le pratiquant est cornered. Il est vrai qu’on retrouve cette situation dans de nombreux jeux qui sont conçus pour maintenir dans un état de peur et de tension. Je pense par exemple à F.E.A.R., Doom 3, Stalker, et surtout Manhunt et sa suite. Autant de jeux qu’on ne retrouve pas chez la plupart des « school shooters » ou des « amoklaufers », à l’exception de Kimveer Gill, le tueur du Dawson College de Montréal, qui avait toute la panoplie (pourquoi a-t-on préféré insister sur Super Columbine Massacre RPG, cela me dépasse).

Est-ce que ce mot s’applique au premier Doom et à Counter Strike ? Pour avoir joué récemment au premier Doom, j’avoue que parfois il fait encore peur et qu’il met dans des situations où on est cornered (pas toujours). Cela n’explique pas toutefois pourquoi les tueurs de Columbine le pratiquaient six ans après sa sortie alors qu’il était dépassé, tant sur le plan graphique et technique (notamment par Quake, que les futurs tueurs exécraient ouvertement), que sur le plan de la violence gore (notamment par Blood et sa suite, jamais retrouvé à ma connaissance dans la ludothèque d’un « school shooter »). J’ai également joué régulièrement à Counter Strike, et je maintiens que ce jeu n’a pas le « bon profil ». Il y a certes des couloirs, mais il y a toujours un moyen de sortir à l’extérieur. On peut même rester planté devant une fenêtre et se tourner les pouces en attendant qu’un adversaire pointe le bout de son nez (on appelle ça « camper »). Et si on se fait tuer, eh bien on attend la conclusion de la partie et le chargement de la suivante. De plus, on joue toujours avec d’autres joueurs « humains », soit comme adversaires, soit comme coéquipiers, et on les retrouve toujours partie après partie, ce qui fait qu’on n’est jamais seul (à moins de ne vouloir jouer qu’avec des « bots » – des personnages contrôlés par l’ordinateur -, ce qui est beaucoup moins amusant). Certes, la convivialité peut être gâchée, soit par la compétition (certains joueurs ne sont là que pour « faire du chiffre »), soit par l’immaturité des participants (insultes, comportements idiots…), soit par leur volonté de rester entre eux à tout prix. Mais même en considérant ces inconvénients, on est très loin de l’imaginaire de violence solitaire auquel s’accrochent les « school shooters ». Ça ne colle tout simplement pas.

Sur mon « indulgence » supposée envers les jeux vidéo, je crois que vous m’avez très mal compris. Tout d’abord, je n’ai pas prononcé ce terme pour rien: il s’agit des jeux vidéo, dans leur ensemble et tous genres confondus : pas seulement Counter Strike, mais aussi Super Mario, Civilization, Europa Universalis et j’en passe. Or, je soupçonne le « grand public » de ne connaître que ce que les médias généralistes lui ont montré, et les médias généralistes de ne montrer que ce qu’ils veulent bien retenir, à savoir, en majorité : la violence, la violence, la violence, l’addiction, l’addiction, l’addiction (et à la rigueur la Wii). A mes yeux, « les jeux vidéo » ne se résument pas et ne se résumeront jamais à une réduction aussi caricaturale. Donc quand je lis que le tueur était un « fan de jeux vidéo » alors qu’il ne jouait qu’à Counter Strike et consorts, je ne suis pas d’accord. Quand je lis en titre d’article que le Parlement européen met « les jeux vidéo » en cause alors qu’il ne s’agit que de restreindre la vente des « jeux violents » et que l’une des députées dit explicitement qu’elle ne veut pas diaboliser le médium, je considère ce titre comme un mensonge et une fumisterie. Ce n’est pas de l’indulgence, c’est de l’intransigeance vis-à-vis de ce qui n’est que la vérité. Parler « des jeux vidéo », c’est comme parler « du cinéma » ou « de la musique ». Et dans le cas qui nous préoccupe, c’est un non-sens.

Cela dit, ne vous méprenez pas : je me doute bien que quand vous avez dit « les jeux vidéo », vous ne pensiez en fait qu’à une certaine portion de « jeux violents » (et je suppose que c’est ce que vous avez compris à tort quand vous avez lu « les jeux vidéo » dans mon article). Je me souviens en effet que vous avez dit publiquement à plusieurs reprises que 75 à 80 % des jeux n’étaient pas concernés par ses pires aspects. Néanmoins, parler en public « des jeux vidéo » pour les 20 à 25 % restants, c’est vous faire hara-kiri. Rappelez-vous que de nombreux joueurs ont l’impression d’être des bêtes traquées, cornered comme vous dites. On a tellement réduit le jeu vidéo à ce qu’il avait de pire, et à l’inverse généralisé ce pire à l’ensemble du médium, que la moindre ambiguïté ne sera pas pardonnée. J’espère en tout cas que vous comprenez mieux la manière dont j’ai choisi mes termes.

Maintenant que ce point a été clarifié, suis-je vraiment « indulgent » vis-à-vis des « jeux violents » ? Je ne pense pas. Je n’ai défendu que Counter Strike (ou plutôt je lui ai rendu justice), puisque c’est le seul jeu dont on soit sûr qu’il était pratiqué par le tueur de Winnenden comme par ses prédécesseurs. Pour les autres, je me suis borné à constater qu’ils n’étaient pas impliqués. Je suis donc très loin de les défendre. Vous savez déjà à quel point je méprise Manhunt et sa suite, ce n’est réellement pas un jeu que j’ai envie de soutenir. Vous savez aussi à quel point le fait de voir, à l’intérieur d’un magasin de jeux, des gosses de moins de 10 ans charcuter des passants à la tronçonneuse devant une console de démonstration (et ce avec l’accord des parents !) me met mal à l’aise. Mais parlons plutôt d’un autre jeu qui était pratiqué par les tueurs de Columbine : Duke Nukem 3D. Dans mon précédent article, j’ai cité leur ami Brooks Brown, qui avait écrit un livre où il parlait de son expérience de lycéen à Columbine. J’ai dit qu’il avait disculpé les jeux vidéo, et c’est le cas : il maintient qu’ils n’ont pas causé la fusillade. Mais il a également révélé dans son livre que certaines étapes du plan dressé par les tueurs était inspiré de Duke Nukem 3D (par exemple, quand ils ont placé les bombes à tel ou tel endroit). Donc, je ne conteste pas plus que lui le fait que la violence des médias stimule parfois l’imagination (pour ne pas dire la « créativité ») de cerveaux malades. Et je ne doute pas qu’il serait très facile d’apprendre des choses en repassant en boucle les scènes d’exécution de Manhunt et de la version non « censurée » de Manhunt 2.« 

J’aimerais préciser deux choses par rapport à ma réponse.

Premièrement, quand Brooks Brown mentionne Duke Nukem 3D, il est on ne peut plus clair sur le fait que ce n’est pas ce jeu, ni aucun autre jeu, qui a incité ses deux amis à planifier puis exécuter la tuerie de Columbine. Comme il le dit souvent, « ce sont Dylan Klebold et Eric Harris les responsables de la tuerie du lycée Columbine, mais c’est le lycée Columbine qui est responsable d’avoir fabriqué Dylan Klebold et Eric Harris ». Il n’y ont même pas puisé l’idée d’un tel carnage, leur modèle étant plutôt l’attentat d’Oklahoma City de 1995, ainsi que, dans une moindre mesure, la fusillade de Jonesboro de 1998. En revanche, ils ont « testé » deux ou trois idées en croyant qu’elles marcheraient juste parce qu’après tout elles fonctionnaient dans leurs parties de Duke Nukem 3D. Et je maintiens également que certaines scènes d’exécution des deux Manhunt peuvent être reproduites facilement dans la vie de tous les jours.

Deuxièmement, quand je parle du  « fait de voir, à l’intérieur d’un magasin de jeux, des gosses de moins de 10 ans charcuter des passants à la tronçonneuse devant une console de démonstration », je parle malheureusement d’une scène que j’ai vue de mes yeux le mois dernier. Un « jeu de racailles » (probablement Saints Row 2) était en démonstration et par conséquent n’importe qui pouvait y jouer. Une troupe de gamins de 8 à 12 ans en a profité pour s’emparer de la manette. Après quelques minutes de balade à moto, l’un des gamins s’est mis en tête de tirer sur tous les passants, puis il s’est emparé de la tronçonneuse. Je me suis permis de demander à la vendeuse s’ils n’étaient pas un peu jeunes pour jouer à ce genre de jeux. Juste à ce moment-là, on pouvait voir et entendre le hurlement d’agonie d’un passant pendant que la tronçonneuse lui passait dessus, faisant gicler le sang, tout ça sous les yeux des enfants. La vendeuse m’a répondu, un peu gênée aux entournures (tout comme les autres clients qui regardaient la scène), que la mère avait donné son accord. Quelques hurlements, bruits de tronçonneuse et gerbes de sang plus tard, elle a ajouté : « quand les parents sont d’accord, on ne peut rien faire ». La semaine précédente, j’avais assisté au même attroupement d’une autre bande de gamins, mais cette fois c’était devant le dernier Call of Duty, qui contient lui-même son lot de passages gores et sordides.

Pensez-en ce que vous voudrez, mais il suffit qu’une association un tant soit peu concrernée constate ce genre de spectacle une petite dizaine de fois, puis fasse une compilation des scènes de jeux les plus violents (comme cela se pratique en Allemagne par le biais de Rainer Fromm, de Regine Pfeiffer ou d’autres depuis des années), avant de contacter médias généralistes et hommes politiques, et c’est reparti pour une « Affaire Familles de France », comme il y a 10 ans exactement, mais en pire. J’en profite pour rappeler si besoin est qu’il n’est pas nécessaire d’avoir une tuerie de masse pour qu’un scandale éclate sur les jeux vidéo « violents », loin s’en faut. Un banal fait divers, ou une simple enquête sur les pratiques vidéoludiques des « jeunes délinquants » (quels jeux, combien d’heures par jour, depuis quel âge…) ferait l’affaire.

Revenons maintenant à la fusillade de Winnenden. Peu après avoir répondu à mon ami M. Combaz, celui-ci m’a dirigé vers les dernières dépêches, qui m’ont appris que le tueur aurait joué pendant 2 heures à Far Cry 2. Fort bien, et alors ? Certes, voilà un jeu qui peut se jouer seul, qui contient plus de violence et de sang que Counter Strike (cela dit, ils peuvent l’avoir réduite dans la version allemande), et qui est tellement facile qu’il pourrait à l’extrême rigueur procurer un sentiment de toute-puissance. Mais ça ne suffit absolument pas pour faire de Far Cry 2 un « bon client » pour une théorie sur le passage à l’acte, surtout en ce qui concerne cet « amoklauf » (et ce quoi qu’en disent les reportages à sensation, qui sont prêts à voir des parallèles partout). Allez donc voir le test vidéo de Trem-R sur ce blog, et vous m’en direz des nouvelles.

Je souhaiterais conclure cet article par deux questions qui me trottent dans la tête. Premièrement, j’aimerais bien savoir pourquoi on ne parle plus (du moins en Europe) de la tuerie de l’Alabama, qui a tout de même fait 11 morts, dont l’auteur de la fusillade, une partie de sa famille, et un enfant. Et deuxièmement, j’amerais aussi savoir pourquoi on ne s’interroge pas sur les habitudes vidéoludiques du forcené de 45 ans qui a tiré par la fenêtre de son appartement parisien du 13ème arrondissement avant de se suicider.

Il faut m’excuser, je suis seulement un peu curieux.

Tags: , , , , , , , ,

est joueur depuis les années 80, et joueur passionné depuis 1990. Ouais, à peu près comme tout le monde ici, quoi. Sauf qu'en plus, il cause. Beaucoup. Mais alors beaucoup. C'est pas sain pour lui qu'il cause autant. Faudrait plutôt qu'il joue.
Email | Tous les posts de

25 commentaires »

  1. Je ne suis pas vraiment d’accord avec cette phrase de M. Combaz :

    « Par exemple le geste de recharger, le changement d’arme, la façon de se déplacer dans un couloir et entre les obstacles,tout cela s’apprend et se retient au fil des années »

    J’ai effectué mon service militaire de milice en Suisse, après avoir pratiqué les jeux vidéo de type FPS depuis des années.

    Je peux jurer que les sensations d’utilisation et de tir d’un vrai fusil d’assaut sont complètement différentes d’un jeu vidéo : ce n’est pas avec un clavier et une souris que l’on apprend à tirer… Et encore moins que l’on trouve normal de loger une cartouche dans la tête d’un être humain !

    De même les vrais entrainements tactiques sont très fatigants et tactiquement bien plus poussés que la stratégie moyenne d’un joueur de Counter-Strike. Il faut aller chercher dans les équipes professionnelles ou les très bons joueurs pour observer des stratégies d’équipe bien conçues, et à ce moment on ne peut plus parler de situation de jeu « en solitaire » puisqu’une préparation de haut niveau nécessite un entrainement en salle réseau.

    Mais ce n’est pas vraiment un argument puisque certains, comme Grossman, affirment que les jeux augmentent la précision de tir des jeunes tueurs. Je ne sais pas quoi penser sur ce point, si ce n’est que l’exécution technique du crime n’est pas le problème – qu’elle soit facilitée ou non par un jeu – mais bel et bien le crime lui-même, et la volonté de son auteur.

    Bref, même dans le pire des cas (le jeune tueur passait 8 heures par soir/nuit à jouer à Counter-Strike, et venait d’essuyer une importante série de défaites. Il n’avait pas dormi depuis 36 heures et était fou de rage) –> Quand on arrive à ce point-là, n’est-ce pas aux parents et à l’entourage d’agir ?

    Quand je mange un bon repas, je bois quelques verres de vin. Mais si je m’enfile 20 bouteilles et que je meurs d’un coma éthylique, est-ce qu’il faut interdire l’alcool et condamner tous ceux qui en boivent ?

  2. J’ai moi-même tenu des armes réelles dans les mains, pendant à un voyage aux États-Unis, où ma famille américaine m’a fièrement montré son arsenal (colt, pistolet automatique, fusil de précision…). Et effectivement, il y a de grosses différences entre tenir de telles armes et bouger un curseur de souris. Si on parlait des « lightgun games », l’argument de la précision accrue pourrait avoir une valeur (c’était d’ailleurs la première cible de Dave Grossman).

    Quant à l’alcool, il y en a qui sont prêts à répondre « oui » à ta question. Il n’y a qu’à voir ce qui se passe en ce moment avec les dernières recherches de l’institut national du cancer, et la législation concoctée par Roselyne Bachelot.

  3. Très bon articles sur lesquels je ne suis pas capable d’argumenter même si je suis avec attention tout ce qui est écrit.

    Cependant, dans celui-ci, deux petits points m’ont fait réagir :

    Pourquoi ne pas avoir utilisé le terme « acculé », qui est la traduction fidèle de « cornered » ? Autant la langue anglaise dispose de beaucoup de mots exprimant des concepts complexes à propos desquels il faudrait écrire une phrase entière pour les décrire en français, autant là l’équivalent en français existe ?

    Et un détail de fanboy : Non, S.T.A.L.K.E.R n’est pas un jeu dans lequel on se retrouve régulièrement acculé, la fuite est d’ailleurs une des techniques de survie les plus efficaces. En terrain ouvert, on choisit les escarmouches que l’on veut mener. En souterrain par contre, la situation peut se produire, mais il est toujours possible de revenir sur ses pas pour « se refaire ».

  4. « Dans les sociétés méridionales l’image, la tchatche, la ruse, le mensonge, la violence, jouent le rôle de défouloir permanent. On observe bien entendu des phénomènes de violence en bande dans les milieux défavorisés latins, mais la violence solitaire et qui rumine la tentation de la table rase est un phénomène de pays sans exutoire , où tous les hommes ont été domestiqués par le politiquement correct. »

    Je rejoins assez le point de vue (pas forcément ce qu’il montre). Les structures de contrôle social de violence, la place que la société lui accorde, la canalise, est à la fois un facteur déterminant, et à la fois un symptôme plus large d’une définition du vivant et de l’humain, la limite entre l’exprimable et le vécu.

    J’ai toujours préféré cette « externalisation » des sentiments, ces incarnations charnelles des désaccords, plutôt que l’intériorisation petit-bourgeois. Les rires et les larmes plutôt que les humeurs maussades.

    Je vous conseille d’ailleurs le livre de Richard sennett, sociologue anglais, The Fall of public man (la trad. française m’échappe), qui décrit comment le public a petit à petit intériorisé une façon spécifique d’apprécier des pièces de théâtre. Grosso modo, ça va part du lancer de tomates et apostrophes aux comédiens, au silence religieux et toux étouffées contemporain. Cette intériorisation correspond à certaines valeurs ascétiques (f. Max Weber)

  5. On se retrouve quand même très souvent acculé dans doom : presque à chaque clef ou gros item, les murs s’ouvrent et y’a du monde à tuer.

    Sinon, lorsque le niveau augmente à counterstrike, on est de moins en moins « réaliste », d’autant plus que le jeu ne l’est pas particulièrement quand on le compare à d’autres. En effet, un bon joueur est capable de jouer au jeu lui-même et non pas à la représentation mentale qu’il en a. J’ose espérer que les vrais agents du GIGN ne s’amusent pas à straffer pour jeter des petits coup d’oeil au détour d’un coin avec un grenade dégoupillée à la main, qu’ils balancent ces même grenades « au cas où » dans des bureaux, ou qu’ils tournent vite la tête dès qu’ils les entendent voler. Sans parler de la « petite danse » des straffes entrecoupés de petites rafales.

    Mais cette idée que tripoter une souris vous transforme en machine de guerre est répandue. J’avais été abordé il y a quelques années en bas de chez moi par deux abrutis qui distribuaient des prospectus expliquant que les FPS étaient financés par les militaires et qu’ils permettaient d’avoir un vivier de machines à tuer. Ils avaient quand même deux faits irréfutables, bien que n’étayant pas leur propos.
    * il y a bien un FPS financé par l’armée américaine destiné à promouvoir son image
    * certaines armées utilisent les jeux vidéos pour entraîner certains soldats
    J’imagine que pour le grand public ça doit suffire pour convaincre … d’autant plus que je suis persuadé que les MMORPGS ont été créés par le MEDEF pour nous habituer à payer pour faire un travail répétitif et peu valorisant.

  6. @bartavelle : pour les deux distributeurs de tracts, ce ne serait pas Solidarité et Progrès, par hasard ?

    Quant aux deux éléments que tu mentionnes, effectivement, l’armée américaine finance America’s Army pour recruter, et utilise des simulateurs pour entraîner ses soldats. Sur ce point, on est donc très loin des FPS « civils », en terme de technologie (pour la partie matérielle notamment) aussi bien qu’en terme de réalisme.

  7. Il y a tout de même des FPS « civils » qui vont dans la direction du réalisme sans prôner le sang : SWAT4 par exemple, qui simule les forces de police et l’éthique qui les accompagne.

    Ainsi le mode « Elite » nécessite que l’on ne tue personne pour gagner ; il faut donc équiper ses agents d’armes non léthales et arrêter les suspects sans les descendre ! Encore un exemple qu’on ne cite pas…

  8. J’ai une question, enfin plutôt une problématique qui me trotte dans la tête depuis longtemps, je ne sais si j’arriverais a expliquer mon malaise de la communauté des JV, mais je vais essayer de m’expliquer de façon concise afin que tu puise, quand tu auras le temps entre tes articles qui sont du journalisme a part entière, et que soit dit-en passant, je surkiffe.

    J’ai l’impression que la où le média de masse caricature le jeu video, la où on l’opprime dans la politique, j’ai l’impression d’avoir un culte, une sorte de sur estimation du JV.

    Le JV peut être décidé comme un art, un passe temps, un loisir, une passion voir même y dédié sa vie entière. Mais est ce que le JV ne ferait pas un peu ce que le Metal a comme effet pervers? J’explique, le JV rassemble des gens, d’ages avoisinant entre 10 ans (grosso modo) et 35 ans (nombre pris totalement arbitrairement), c’est plus vers les vieux ados (partons du 16 a 22 ans) que les jeux videos peuvent être pris de façon sérieuse.

    Face a une critique illégitime, le désir de faire entendre non pas une vérité mais une voie, demandant parole pour un vrai débat et non pas une simulation de pathétisme avec une pseudo analyse de psyciatre/psycologue. Oui, cela est vrai, légitime, il faut empecher cette vision stupide des jeux videos.

    Mais ce qui me fait peur, c’est justement cette bande de passionnés. C’est un peu comme ceux disant que: La politique, c’est de la merde, tous des pourris, droite d’enfoirés, et j’en passe (bon, je caricature peut être, mais ce n’est pas le problème) Ca se persuade d’avoir raison, ca vit sur des ‘acquis’ et ca pense juger un système…

    Je ne veux pas me faire l’avocat du diable, je ne dit pas que cet abrutisation des JV peut avoir des circonstances atténuantes, clairement non, on ne peut être laxiste quand on se fait trancher dans le vif. Mais ce devrait être ce phénomène de communauté qui devrait avoir un VRAI esprit critique.

    Prenons Kevin, il est dans une communauté de joueur aimant le RPG, Kevin écrit bien, lutte contre le sms (parce que c’est le mal, bla bla, vive l’écriture et mon hypocrisie a moi entière, plop) adore le RPG, aime le hardcore (les jeux hein, bande de dévergondés), deteste la politique casual de nintendo (Wii/Ds, de la merde, ma vie, ma psp/ps3, lolilol que je connais l’industrie) et rale encore une fois sur le reportage de france 2 sur les JV. S’en vient: Critique du système, personne ne les comprend, mais eux savent ce qui est vrai…

    Ellitisme? Ce n’est peut être pas le bon mot, mais je préfère le dire comme je le pense, ne penses tu pas que les fanas de JV aiment… s’auto-branler devant leurs passions? Et que vas y que le JV c’est de l’art parce que Ico, Killer 7, 36 jeux peu connus mais je suis trop un vrai gamer par que je les connais. Et que vas y que nous sommes imcompris, qu’heureusement qu’on se comprend entre nous, que nous, nous savons ce qu’est le VRAI monde: Ici, inscrire toute la misèe du tiers monde, la corruption, les trafics, bref, tout ce qui fera qu’a la fin on se pendera avec nos lacets

    Je pense que ce qui est le plus mauvais, le plus pervers, le plus nocif, c’est ce que deviens la communauté du JV…

    Guerre de gang (Big N/Billou/PS), haine et j’en passe (hem… Citons Gamekult, Gamerama, et j’en passe) Mépris d’autrui (JV.com et sa communauté/ses tests, le ‘Kevin’/Noob/boulet) l’hypocrisie (oui mais on essaye de faire en sorte qu’ils comprennent, oui mais non mais tu vois que c’est ça quoi) et surtout… Cette arrogance, ou bien haute opinion qu’on obtient par le JV…

    J’ai vraiment du mal a exprimer mon malaise, je sais que j’ai surement tort, que je dois surement caricaturer ces pauvres gamers… Mais je crois qu’a force qu’ils soient basher sans raisons par la masse, ils en gagnent un statut martyr et légitime, ils en deviennent ce que certains croient que le metal est, quelque chose de forcément bon, auquel on croit avoir une vision objective, et on sais ce qu’est la société autour, pourris, nanère…

  9. Je compte en faire le sujet de deux prochains articles. Le premier devrait expliquer le pourquoi de cette agressivité. Quant au deuxième, il en décrira les dérives.

    Et en parlant de dérives, celles que tu cites sont encore bénignes. Moi, c’est parfois beaucoup plus qu’un malaise que je ressens : c’est de la honte. Honte quand je vois les expéditions punitives contre les blogueurs qui ont osé émettre des doutes sur l’imagerie de Resident Evil 5… et ce même quand ce sont des blogs de jeux réputés et respectés. Honte quand je lis les commentaires des sites et blogs spécialisés américains à propos de RapeLay, où un bon nombre de gamers se mettent à défendre ce « jeu » bec et ongles au nom de la liberté d’expression et du droit du sacro-saint jeu vidéo de traiter de tous les sujets (soi-disant que ça facilitera leur reconnaissance !).

    Mais bon, il me faudra bien deux articles pour en parler en profondeur. Ce que je retiens en tout cas, c’est que grâce à Internet, les médias généralistes, les scientifiques et les « activistes anti-violence » savent qu’ils doivent désormais compter avec les joueurs de jeu vidéo. Ce qui signifie que notre comportement est en train d’être soigneusement étudié, et qu’on a intérêt à améliorer notre défense si on ne veut pas être rejeté dans les mêmes abîmes que les intégristes religieux et les militants d’extrême droite (auxquels certains nous assimilent déjà, surtout en Allemagne).

  10. Très juste.

    Je pense néanmoins à un paradoxe : certains journaux proposent tour à tour des articles très critiques vis-à-vis des jeux vidéo – dans l’actualité nationale et internationale – puis, dans la rubrique « multimédia », des mini-tests de jeux rédigés visiblement par des pigistes qui ne tarissent pas d’éloges même sur les pires boucheries du moment…

    Il m’arrive souvent d’être choqué par certains articles qui glorifient des titres réellement gores et abjects, et ce dans des journaux accessibles au plus grand nombre (gratuits notamment, lus par des enfants et des adolescents).

    C’est regrettable : le pire côtoie le pire. D’une part les journalistes n’utilisent qu’une seule partie des sources disponibles dans le traitement de l’actualité (militants extrémistes anti-JV) et d’autre part, les passionnés ont tendance à s’emballer et ne se rendent même plus compte que certains JV dépassent les bornes de l’acceptable.

    Tu as tout à fait raison Shane, le comportement des militants anti-JV est inquiétant, mais en attendant ce sont eux qui occupent les colonnes des journaux et qui informent l’opinion – d’autant plus qu’ils n’hésitent pas à recourir à des discours manipulatoires et grandiloquants. Si on leur oppose un discours fanatique vers l’autre extrême, personne n’est sorti de l’auberge…

  11. Dans tous les cas, cet article est intéressant ne serait-ce pour le terme « cornered ».
    En découvrant son sens, mon esprit a soudain fait la lumière sur le level design de beaucoup de jeux. Je pense à Resident Evil 4 (je n’ai pas joué au 5).

    Ensuite, personnellement, je suis peu choqué par la mauvaise image des jeux vidéo. Non pas que j’en ai rien à faire, mais parce que, fondamentalement, je comprends mon interlocuteur quand il me dit avoir une mauvaise image du jeu vidéo.
    Et si je puis me permettre, je pense qu’il y a également une question sociale, même si je n’ai aucun élément pour étayer cette impression.

    Dans ma ville (Strasbourg), il y a une librairie et une boutique de jeux vidéo pas très loin. Dans l’une, une ambiance feutrée, la pléiade à ma gauche, des livres à couvertures sobres et le prix sur la quatrième de couverture, en petit. Dans l’autre, une ambiance électrique, un bac d’occaz’ à ma gauche et des jaquettes criardes avec des gros prix. Et avec, deux classes sociales qui, à mon avis, communiquent peu.

    C’est de la caricature, peut-être. Personnellement, je vais dans les deux lieux sans me soucier de quoi que ce soit, mais je veux bien comprendre celui qui a un a priori. Et j’ai vraiment l’impression du jeu vidéo, c’est un peu devenu un symptôme.

    Mais peut-être que quand on dit que ces tueurs jouaient aux jeux vidéo, ça me donne l’impression parfois l’impression, du moins dans le traitement de l’information (l’article montre l’inverse, semble-t-il), que ces personnes n’avaient pas d’éducation, qu’ils n’avaient pas de repères, qu’ils se réfugiaient là comme ils iraient se réfugieraient dans la drogue ou tout simplement, seraient des asociaux.
    En fait, dire que ces tueurs jouaient aux jeux vidéo, ça veut dire bien plus que « jouer aux jeux vidéo ». Ça percute l’esprit de lecteur, son imaginaire. Pour moi, c’est une image pour dénoncer autre chose.

    Je ne sais pas si j’ai raison, c’est une simple proposition.

  12. pardon pour mon affreux Français.

  13. Shane Fenton, je profite de ton expérience encyclopédique du sujet pour te poser une question;
    Les théoriciens de la culpabilité du JV expliquent-ils le suicide quasi systématique des auteurs de school shooting?
    J’ai eu l’occasion de lire les avis tranchés de beaucoup des détracteurs des jeux vidéo, notamment d’ Helga Zepp-LaRouche (http://www.solidariteetprogres.org/article2906.html), et tous ont bien entendu foultitude d’exemples pour illustrer leurs théories.
    L’incroyable précision des tireurs serait due à leur entraînement intensif ingame.
    Leur détachement durant l’assaut, le peu de cas qu’ils font de leurs victimes, viendraient de leur perception altérée de la réalité: tuer est anodin, puisque qu’on peut tuer dès tout jeune, sur son écran. Les « adversaires » ne sont que des espèces de pigeons d’argiles, répétés à l’infini pour satisfaire le joueur.
    Comme dans les jeux, le seul moyen pour eux de « survivre » serait de tuer avant d’être tué; bourreau plutôt que victime. Et c’est ainsi que l’armée US conditionne ses soldats: tuer pour survivre.

    Et c’est cet argument de « survie au détriment des autres » qui me fait tiquer. Pourquoi, alors, se donner finalement la mort?
    Puisque les tueurs n’ont accordé aucune importance à la vie de leur victime, et sont « inconscients » de la portée de leurs actes, pourquoi ne finissent-ils pas par poser la manette, enfin les armes, pour vaquer à d’autres occupations?
    Puisque c’est le jeu qui leur a donné le goût de la combativité, pourquoi ne pas savourer leur exploit, et en endosser la paternité pour les années à venir?
    Puisque pour eux tuer n’est pas grave, pourquoi ne décident-ils pas de continuer leur vie?

    Une brusque prise de conscience? La réalisation de ce que l’on vient de faire?

    Je n’ai pas, pour le moment, vu ce sujet abordé dans les articles sur ces sujets. L’a t-il été? Et comment l’expliquer?

    Merci de tes lumières, et merci de ton boulot incroyable.

    Vincent

  14. C’est vraiment passionnant Shane, bravo.

    Juste une petite remarque sur l’allemand qui serait un tireur d’élite grace aux jeux video.
    Son père fréquentait un club de tir, il est pas dur de supposer qu’il a du lui meme y faire quelques tours.

  15. « Son père fréquentait un club de tir, il est pas dur de supposer qu’il a du lui meme y faire quelques tours. »

    Mieux que ça. Le papa avait un stand de tir à la cave et son fils a plusieurs fois manipulé des armes.

  16. @viiincent :

    Désolé du retard dans la réponse. A ma connaissance, ceux qui blâment les jeux « violents » ne s’attardent pas sur le suicide d’une bonne partie des auteurs de fusillade (à part peut-être les LaRouchistes, qui estiment que ces « jeux de tueurs » sont destinés à transformer les enfants et adolescents en soldats « kamikazes », mais bon, je ne pense pas qu’il faille trop perdre son temps avec eux). Pour la plupart, ils ne s’intéressent qu’à ce qui les a poussés à tuer, et éventuellement à leur « performance » .

    Cela dit, je pense qu’ils seraient capables d’expliquer ce suicide comme une métaphore du « game over ». Ils ont fait tel score, maintenant il faut qu’ils mettent fin à la partie en se flinguant. Certes, je ne les ai pas encore entendus donner ce genre d’explications, mais ça leur irait bien.

    A part ça, j’apprends par le biais de GamePolitics que l’auteur d’une fusillade qui s’est déroulée dans le Colorado en octobre dernier aurait été un no-life complet.

  17. « j’aimerais aussi savoir pourquoi on ne s’interroge pas sur les habitudes vidéoludiques du forcené de 45 ans qui a tiré par la fenêtre de son appartement parisien du 13ème arrondissement avant de se suicider. »

    Question judicieuse ; utopique, puisque globalement tout le monde s’en fout (à part vous et moi ainsi que quelques personnes ici), mais judicieuse. On pourrait élargir la question au sexagénaire qui à ouvert le feu ce matin dans un tribunal de Bavière, tuant au moins deux personnes.

    En lisant vos écrits (que je connaissais d’ailleurs, il me semble en effet que nous nous sommes déjà croisés il y a quelques années sur d’autres forums à ce propos), je suis partagé entre une véritable admiration (et je ne suis pas enclin à en user souvent) et le sentiment que tout ceci n’a véritablement d’intérêt. Au pire en a-t-il pour quelques personnes (dont je fait partie), ce qui n’est déjà pas si mal, mais il n’en aura jamais aux yeux des journaleux qui continueront éternellement à traiter l’univers des jeux vidéo comme un générateur de psycho-killers.
    A partir de ce constat, soit on se retire en ermite dans une grotte jurassienne (avec tout de même une connexion adsl, faut pas non plus pousser le concepte d’ermitage trop loin !), soit on adopte la position qui est la vôtre, on cherche à comprendre (et peut être à faire comprendre). L’une comme l’autre demande des sacrifices ; si vous vous souvenez de moi, vous comprendrez que je suis passé en quelques années de la posture n°2 à la n°1, avec peut être même la possibilité de carrément abandonner la connexion adsl dans la grotte.

    Toujours est-il que tomber sur ce genre d’article tend à me rappeler à mes premières amours, ce qui, je vous prie de me croire, n’est pas chose aisée.

    Dans tous les cas, bel article, belle recherche, continuez et je vous lirez.

    (et votre site est vraiment excellent !!!)

    Spidernounours.

  18. Bonjour à tous, je viens de découvrir le site, et le débat est passionnant, éclairé, riche en efforts d’objectivité; bref, tout ce que la plupart du journalisme actuel ne se donne plus la peine de fournir…

    Je m’excuse d’avance des quelques raccourcis qui figureront dans mon raisonnement, libre à vous bien entendu de les critiquer.

    La première chose qui m’a frappé dans un reportage sérieux (France 5) consacré au jeune tueur, était le témoignage de ses « camarades » : tous, sans exception, ont reconnu qu’il était rejeté, voire harcelé au sein du Gymnasium…c’est-à-dire, si j’extrapole, que le fait était suffisamment systématique, évident, pour que tout le monde le dénote. On peut tenter imaginer l’état d’esprit dans lequel il se trouvait.

    Toujours dans ce même reportage, la réaction de certains adultes de la ville était tout aussi frappante, il ne démontraient pas de la haine, du rejet pour le tueur, mais une certaine indulgence, allant quelquefois jusqu’à la compassion.

    Non pas que cet état de fait soit une justification de l’acte en lui-même, mais bien un constat d’une situation qui semble bien plus plausible en tant que déclencheur de l’acte lui-même…pour reprendre le terme de M. Combaz, cet ado était « cornered », indubitablement, IRL.

    Petite digression pour témoigner ici de ma propre expérience: ayant été victime ,à moindre échelle, de cette pratique courante au sein des collèges et lycées, je peux comprendre ce qu’a pu ressentir le tireur. Et cette sensation peut paraitre d’autant plus inexpugnable que le comportement des jeunes est bien souvent empreint d’un certain mimétisme entre eux. Bien sûr, je n’en suis pas arrivé à une telle extrémité, mais je défends l’idée que ce rejet est déjà bien suffisant pour provoquer une telle tragédie, sans vouloir tomber dans le pathos.

    Et les portes dérobées pour s’extraire de ce cercle vicieux ont, selon moi, tendance à disparaitre dans une société en proie à l’individualisation « à outrance », même avec la maturité acquise au fil des ans. On s’y installe, dans cette solitude, à défaut d’autres possibilités de sociabilisation atteignables rapidement, facilement, pour quelqu’un déjà usé par plusieurs années de ce régime exténuant.

    Pour en venir au fait, l’origine de cette tuerie n’est pas, et de manière évidente, la consommation d’images violentes, la pratique intensive de jeux vidéos, voire même la présence d’armes à portée de main…et j’arrive difficilement à concevoir que tant de personnes sensées être capable de l’objectivité nécessaire pour dégager les mécanismes d’un fait issu de la réalité (« les journalistes » notamment…) ne le soulignent pas dans les médias. Bien entendu j’évacue toute considération de facteurs tel que l’audience des JT, les ventes d’un journal, etc, à assurer, mais pas par naïveté, mais simplement en restant persuadé qu’il subsiste encore quelque part des personnes qui soient capables de l’honnêteté nécessaire…

    La forme du massacre n’est ici que la résultante des catalyseurs qu’ont été la passion du père pour les armes à feu, l’habitude de les utiliser, réellement et peut-être aussi virtuellement…mais, à mon avis, cela aurait été un attentat à la bombe s’il avait été passionné d’explosifs, un incendie s’il était avait pyromane, une attaque bactériologique s’il avait eu accès au matos adéquat.

    Bref, pour moi, et en résumant à l’extrême ma pensée, cette stigmatisation des jeux vidéos ne découle que de l’hypocrisie ambiante, de la volonté de déporter l’attention des masses de la vente d’armes à feu aux civils, des dangers d’un individualisme grandissant, de la cruauté potentielle des personnes (que j’attribue aussi bien aux autres élèves qu’au tueur, bien entendu…). Et ce débat, aussi intègre soit-il, n’a pas vraiment lieu d’être si ce n’est de répondre aux accusations biaisées des médias et politiques, ne désignant rien de moins qu’un bouc émissaire.

    Dans tous les cas merci à vous tous pour vos interventions, ou tout simplement votre intelligence, qui me permet de rester conforté dans l’idée qu’il existe une forme de conscience, critique et réactive, parmi certains.

  19. Tiens, selon la police locale, il n’y a rien qui permette d’affirmer que le tueur de Winnenden aurait joué à Far Cry 2 la veille de la tuerie, contrairement à ce qu’a raconté le Spiegel et qui a été repris sans recul dans la presse internationale.

    Cela dit, à mes yeux, quand bien même il y aurait joué, ça ne changerait strictement rien.

  20. Shane, je reprend un truc bête, certainement que c’est pas aussi poussé et journalistique que ce que dises les passionnés comme toi mais un gars sur Gamerama avait dit une chose que j’ai trouvé, somme toute, très censé:

    ça fait des polémiques car c’est un média destiné aux enfants et que les adultes sont débiles et pensent que écraser quelqu’un dans un jv va inciter leur mioche à écraser des gens dans la vraie vie. mais il n’y a rien de subversif et de violent dans le jeu vidéo actuellement. man hunt, gta, c’est de la violence pour kids. super je tue des gens, mais en fait osef il n’y a aucun travail sur l’émotion de tuer des gens, aucune véritable violence qui provoque un malaise.

    Globalement, ca reprend ce que tu disais, et quand on se rend compte, très peu de jeu pousse dans la psycologie. Limite, No More Heroes serait plus dangereux que des jeux estampillés violent vu que Travis aime le sang, la mort, que on travaille les personnage, le dilemme de travis, mine de rien, NMH est plus violent psycologiquement que de nombreux jeux bourrins. Enfin c’est une réfléxion qui me vient.

  21. Il y a du nouveau : le père du tueur de Winnenden est accusé d’homicides involontaires par le parquet de Stuttgart. Il risque jusqu’à 5 ans de prison parce qu’il a laissé le pistolet Beretta dans une penderie au lieu de l’enfemer dans un coffre blindé.

  22. Effectivement, et à cette occasion, une certaine presse a ressorti les allégations habituelles (le tueur jouait pendant des heures à CS et Far Cry 2, il visait en particulier la tête, etc…).

    A part ça, il y a eu une tuerie dans la ville de Lörrach (pas loin de Winnenden) : une avocate de 41 a d’abord tué son mari et son beau-fils, puis elle a fait irruption dans un hôpital où elle a fait feu avant de se faire abattre par la police (voir la dépêche Associated Press).

  23. Jouait-elle à Léa Passion Club de Tir ?

  24. Attention, tu vas te faire taper sur les doigts par le Stern : en effet, ce tabloïd a fustigé le méchant et « cynique » internet qui ne fait rien que se moquer des braves journalistes, alors que chacun sait qu’ils font leur travail avec professionnalisme (Googletrad allemand-anglais faute de mieux).

  25. Purée ils sont forts, je n’y aurais même pas pensé. Comment instrumentaliser le drame de Lörrach en critiquant les méchants jeunes insensibles qui commentent sur la Toile sans aucune pitié.

Ajouter un commentaire